Courant décembre, le gouvernement mexicain se sentait en position de force. Il avait mis en place un dispositif de bouclage de la zone de la forêt lacandone, persuadé d'avoir isolé la guérilla dans un petit territoire à l'est du Chiapas. Or, le 20 décembre, l'EZLN occupait sans violence 34 municipalités situées à l'ouest de cet Etat. Les cartes étaient ainsi redistribuées.
Mauvais élu de 1988, Carlos Salinas avait su à la fois restaurer sa crédibilité et stabiliser la situation sociale interne, en faisant sortir l'économie mexicaine de la crise de la dette. Le plan de réduction de la dette et la baisse des taux d'intérêt américains ont favorisé la croissance de l'économie mexicaine de 1989 à 1992. La mise en oeuvre de l'Alena faisait miroiter le mirage d'un ancrage définitif du pays dans l'Amérique du Nord.
Deux mois après le retour d'Aristide en Haïti, la situation reste complexe. Pour y voir plus clair, nous reproduisons ici des extraits d'un entretien réalisé avec deux responsables d'organisations non gouvernementales résidant en Haïti.
Encadré : Bérets bleus et bérets verts
L'heure de la lutte armée semble passée dans les pays de l'isthme, la longue décennie qui s'était ouverte avec l'entrée à Managua des sandinistes en 1979 s'est close au Nicaragua d'abord, quand le Front sandiniste a perdu le pouvoir, puis au Salvador, quand, après la deuxième «offensive finale» de la guérilla, des négociations véritables ont enfin ouvert la voie à la paix. Au Guatemala aussi on négocie; une guérilla encore active, mais qui a vu s'éloigner toute possiblité de renouveler l'exploit des sandinistes, entreprend la première étape de son retour à la vie civile.
L'effondrement du système communiste et la crise des modèles sandiniste et cubain posent des questions. Les gauches centraméricaines, comme celles du monde entier, vivent une profonde crise d'identité. Beaucoup de militants et de dirigeants ne se reconnaissent plus dans les mouvements -- parfois dans les causes -- auxquels ils ont adhéré et dont ils ont soutenu les luttes.
Jorge Castañeda s'est fixé dans « La Utopía desarmada » (1) un objectif des plus ambitieux : faire le bilan d'un siècle de gauche en Amérique latine et tirer les leçons de ses victoires, de ses changements de cap, de ses erreurs et de ses tragédies. Il s'agit, au terme de ce long périple de refonder un projet, reformuler une stratégie, pour que le vent de la transformation sociale puisse à nouveau souffler sur les terres latino-américaines.
Depuis son deuxième congrès, le Front sandiniste de libération nationale s'enlise dans la crise. Le départ annoncé de Sergio Ramirez et de ses proches a été suivi par des démissions fracassantes de certains cadres historiques du sandinisme, dont celle du père Ernesto Cardenal. Le point sur une crise annoncée et sur la réaction de certains militants de la base et du sommet.
Encadré :Pourquoi j'ai rompu
Sergio Ramirez vient de quitter le FSLN et Dora Maria Tellez de démissionner de la direction du Front. Peu de temps avant, il avait accordé une entrevue au quotidien espagnol El Pais . En voici quelques extraits.
Après Ernesto Cardenal, Gioconda Belli, poète emblématique de la révolution nicaraguayenne, a abandonné un FSLN qu'elle ne reconnaît plus. Elle l'a fait sous forme d'un poème publié dans le supplément culturel du Nuevo Diario, sans présentation. Il n'y a pas eu pas de réponse, seulement un encadré non signé de Barricada affirmant que le FSLN s'épurait des éléments indésirables.
Fin 1994 1994, le Front Farabundo Marti de libération nationale tel qu'il existait depuis octobre 1980 n'est plus : l'Expression rénovatrice du peuple (ERP), dirigée par Joaquin Villalobos, et la majeure partie des militants de la Résistance nationale (RN), d'Eduardo Sancho, ont quitté ses rangs pour former avec le Mouvement national révolutionnaire (MNR) une nouvelle organisation de tendance social-démocrate, le Mouvement démocratique (MD).
Encadré : Rien ne va plus !
Grâce au soutien de différents secteurs sociaux, l'Unité révolutionnaire nationale guatémaltèque (URNG) est devenu un acteur politique incontournable, tandis que la société civile s'organise.
Avec les élections du 21 août dernier, un cycle vient de s'achever pour le Parti de la révolution démocratique. ...mergeant de la vaste coalition qui avait bien failli renverser le PRI en 1988, le parti de Cardenas, arrivé en troisième place dans les suffrages, panse aujourd'hui ses plaies. Bien que ce résultat ne faisait pas l'ombre d'un doute pour les médias internationaux, il en était tout autrement dans le pays: au lendemain des élections une forte commotion a envahit les rangs cardénistes.
Cuba, on le sait, n'est pas épargnée par la crise politique. La presse a abondamment rendu compte du sinistre économique que connaît l'île et des milliers de personnes qui ont tenté de la quitter durant l'été 1994. Mais les médias parlent moins des débats politiques qui existent au sein du Parti communiste cubain (PCC) et de l'existence ou non d'une alternative indépendante de l'impérialisme. Afin d'essayer de définir les possibilités de l'émergence d'un courant de gauche à Cuba, alternatif à la politique actuelle symbolisée par Fidel Castro, « Volcans » a rencontré Janette Habel collaboratrice du « Monde diplomatique » et auteur de « Ruptures à Cuba » (1).
Trois ans de dictature n'ont pas réussi à anéantir le mouvement démocratique et la gauche haïtienne. L'Organisation politique Lavalas se veut l'héritière du mouvement social qui avait balayé le pays lors de l'élection de Jean-Bertrand Aristide. Elle veut rompre avec la politique haïtienne traditionnelle. Nous avons interrogé une de ses fondatrices, l'historienne Suzy Castor
« Le mur de Berlin est tombé, ce mur devra tomber aussi. » Côté mexicain, les candidats à l'émigration clandestine s'agglutinent en attendant la moindre opportunité. Côté américain; les hélicoptères et les patrouilles de la police de migration offrent en permanence un bien curieux ballet.