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Quid de toutes les amériques en France ?

Par Henryane de Chaponay

Quelle coopération pour l'Amérique latine ? C'est la question que se pose un programme qui a débuté fin 1994 sous l'égide d'un large comité de pilotage animé par le Centre d'étude du développement en Amérique latine (Cedal) que sa présidente présente dans cet article.

Partis du constat que l'intérêt pour l'Amérique latine diminuait dans l'opinion publique française, les organisations non-gouvernementales (ONG) réunies au sein du Groupe Amérique latine de la Commission coopération et développement ­ espace de concertation entre les organismes français de solidarité internationale et les pouvoirs publics ­ ont souhaité qu'une action spécifique soit menée, non seulement pour relancer l'intérêt pour les échanges avec l'Amérique latine, mais aussi pour faire connaître toutes les initiatives intéressantes qui peuvent stimuler cette coopération et en renouveler les contenus et les méthodes. « Quid de toutes les Amériques en France ? » est un programme orienté vers les associations, ONG, chercheurs, collectivités locales et journalistes sur le thème du développement local et de la citoyenneté. L'objectif est d'atteindre « une meilleure connaissance mutuelle et une analyse critique des actions de coopération qui permettraient d'agir plus efficacement et de mobiliser un plus large public autour de l'Amérique latine » (1).

Le comité de pilotage réunit à la fois des associations, ONG, universitaires et réseaux travaillant sur le développement local (association de journalistes Amérique latine et Caraïbes, Cedal-France; Cicda, Cités unies France, Economie et humanisme, Etudiants et développement, Programme solidarité habitat du GRET, IHEAL, La vie nouvelle, Mouvement des réseaux d'échanges réciproques de savoir, Réseau de réciprocité des relations Nord/Sud, Union nationale des associations de développement local).

Sous son égide, le programme s'est fixé plusieurs objectifs. Il se propose d'une part, de décloisonner les acteurs de la coopération afin que les informations circulent et qu'il puisse y avoir des réflexions entre ces acteurs à partir de différents points de vue et compétences. Il cherche également à identifier des expériences d'échange et de coopération au niveau local dans les différentes régions françaises, à faire des études de cas pour en présenter l'historique, les objectifs, contenus et méthodes, afin de mener une réflexion avec les acteurs impliqués sur les enseignements qu'il est possible d'en tirer et de quoi elles sont porteuses, dans une perspective de réciprocité. Un bulletin, Comunicando, rend compte périodiquement des avancées du programme. Enfin, le programme organise des rencontres dans des régions françaises qui sont des occasions de mener collectivement une réflexion sur les expériences locales.

Une première rencontre a eu lieu en Ile-de-France, à Evry, fin novembre 1995, autour de la présentation d'expériences et de quatre ateliers sur la coopération décentralisée, la formation des citoyens, l'économie populaire et le commerce équitable, la formation de « relais ».

La réciprocité dans les échanges

Basé sur la notion de réciprocité, le bulletin rendant compte des débats s'interroge (1) : « La réciprocité est-elle un ingrédient supplémentaire, une retombée possible, souhaitable, mais non absolument indispensable de la solidarité internationale, ou bien en est-ce un des fondements ? Dans un cas, il s'agit d'atténuer le clivage entre les bailleurs de fonds soucieux du bon usage de leurs dons et les récipiendaires. Dans l'autre, la quête de réciprocité suppose une tout autre démarche qui débute par un questionnement de la participation citoyenne et du développement local ici même, autour de nous. De quelle façon la coopération avec les pays du Sud ­ compte tenu de la relation que les interlocuteurs sont capables de construire autour du transfert financier ou technique qu'elle implique ­ peut-elle apporter de nouvelles perspectives et un surcroît de méthodes efficaces au renforcement chez nous de la responsabilité citoyenne ? Introduire l'eau courante, organiser des coopératives transforme les relations entre les personnes au sein du groupe, village, quartier où se développent ces projets et affecte le rapport entre la population et d'autres instances sociales ou administratives. Le « développement » possible se situe dans ces relations plus que dans telle infrastructure ou tel service, ce sont elles et les rapports de pouvoir qui se bâtissent sur elles qui doivent permettre à chacun plus de bien-être, de participation responsable, d'autonomie. Qui est donc à l'origine des actions de solidarité, qui s'en fait le porte-voix... Une bonne compréhension, rigoureusement informée, du contexte général et des conditions spécifiques de la coopération envisagée n'est pas seulement nécessaire à l'instauration d'un partenariat efficace. Partagée, explicitée avec les bénéficiaires directs et tous les acteurs, elle peut aider à dépasser l'assymétrie de l'assistance matérielle en éclairant ce qui fait obstacle, ici comme là-bas à la participation sociale et en cherchant ensemble, dans l'expérience des uns et des autres, les relais possibles. Chercher la réciprocité, c'est aussi apprendre à reconnaître au Sud une sociabilité moins bridée que la nôtre, des formes de solidarité multiples très présentes dans la vie quotidienne, d'autres valeurs qui mettent en cause l'universalité de nos modèles. La différence même des modes d'appartenance et d'exclusion force à réfléchir sur les processus sociaux à l'oeuvre dans notre société, suggère des méthodes pour les infléchir, incite à flexibiliser nos cadres de pensée. Que la coopération avec les partenaires latino-américians conduise à être meilleur citoyen chez soi, n'est-ce pas une façon d'exercer à la fois la solidarité et la réciprocité ? »

Face à l'importance des initiatives dans le Grand Ouest (Bretagne et pays de Loire), une deuxième rencontre est prévue pour la fin 1996. Grâce aux membres de la Coordination des associations de solidarité internationales (CASI) de Bretagne, une quinzaine de groupes locaux ayant des projets avec l'Amérique latine ont été identifiés. De nombreuses villes ont aussi des accords de coopération avec l'Amérique latine, mais la liste avec les projets qui concernent les collectivités locales est à compléter. L'objectif est également de construire des propositions pour contribuer aux orientations de la politique de coopération.


(1) Marielle Pépin Lehalleur, IHEAL, dans « Comunicando » nº4-5. Cedal, 43 ter, rue de la Glacière, 75013 Paris (tél. : 16-1- 43 37 87 14).


Encadrés

La coopération entre l'IHEAL et la ville de Neuquén (Argentine) et Participation communautaire en Ixcan
Volcans, numéro 22

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