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A San Cristobal, avant la rencontre

Début juillet, à San Cristobal, s'est tenu à l'appel de l'EZLN un forum pour la réforme de l'Etat, destiné à préparer la reprise du dialogue de San Andrès. Nous publions un résumé des conclusions de cette réflexion, intitulée « Vers une organisation politique d'un nouveau type ».

Une minorité locale, fraternellement unie dans les cercles du pouvoir politique et économique, gère le pays comme une entreprise privée. Les grandes décisions économiques, politiques et sociales qui influencent la vie du plus grand nombre, sont prises par cette minorité (...).

Chaque jour au nom de la légalité se ferment de nouveaux espaces, tandis que s'accroît l'illégitimité du système dominant et qu'augmente l'aspiration à construire un monde nouveau. Nous, Mexicains, n'acceptons plus d'être traités à vie comme des mineurs ; nous avons entrepris de nous regarder les uns les autres, de dialoguer, de chercher le chemin commun qui nous permettra de conquérir l'espérance.

Dans cette quête, l'EZLN a appelé les Comités civils du dialogue, ceux qui construisent le Front zapatiste, de même que des invités d'organisations sociales et politiques de toutes sortes, à se rencontrer au forum spécial sur la réforme de l'Etat. Pendant toute une semaine nous avons débattu en vue de la construction d'une organisation politique d'un type nouveau. Cette initiative a pu avoir lieu en partie grâce aux ouvertures pratiquées par l'EZLN. Elle est aussi le résultat de la Consultation nationale pour la paix et la démocratie, réalisée le 27 août 1995. Par ailleurs, elle traduit également ce qu'exprimait la 4e Déclaration de la forêt Lacandone du 1er janvier 1996.

Dans cette ville de San Cristobal, se sont donné rendez-vous 136 comités civils de dialogue, 220 délégués venant de 30 Etats de la République, ainsi que 65 délégués représentant 34 organisations politiques et sociales, parmi lesquelles on trouve entre autres l'Assemblée de quartiers Puerta Nueva, l'Assemblée citoyenne de débiteurs de la Banque, le Forum régional indigène maya, le Comité de défense pour la liberté indigène, l'Alliance civique du District fédéral, El Barzon, le PRD, le mouvement des chrétiens engagés avec les luttes populaires, etc. (...)

Pour ceux qui ont assisté à ce forum, il a paru clair que cette nouvelle force politique différera nécessairement d'une organisation traditionnelle, tant par son contenu idéologique que par sa composition sociale. La pluralité devra être une de ses caractéristiques essentielles. Comme le seront également la tolérance et le sens de la responsabilité sociale qui se traduit par le mot d'ordre « Commander en obéissant ».

Beaucoup des ingrédients nécessaires à cette nouvelle force politique sont le fruit des luttes que le peuple mexicain mène contre l'autoritarisme : démocratie directe, lutte contre le pouvoir illégitime et corrompu, indépendance et autonomie de l'Etat et des partis politiques, politique d'alliances claire et transparente, prise de décisions fédérative et horizontale, défense des différentes formes de communitarisme pluri-ethnique autonome, solidarité véritable et appui mutuel, etc. (...) Rotation des élus, révocabilité et caractère temporaire des mandats, circulation de l'information, doivent être institués si l'on aspire à la construction d'une nouvelle société (...).

Il est clair que les sujets sociaux en lutte, appartenant aux secteurs les plus divers, s'élèvent jusqu'à la scène politique nationale, allant ainsi bien au-delà du seul exercice du pouvoir tel que le système le comprend. La lutte démocratique ne peut se réduire à la lutte électorale. La lutte pour l'autonomie et le libre gouvernement est beaucoup plus que la lutte pour accéder aux crédits et aux prébendes que le gouvernement administre et dont, en réalité, il se sert (...). Il est nécessaire de montrer que les relations entre les hommes ne nécessitent pas la présence d'un pouvoir extérieur, qui se situerait au-dessus d'eux (...).

La nouvelle force politique devra lutter pour aller bien au-delà des limites étroites et des schémas de la prétendue démocratie parlementaire, aujourd'hui en crise mondiale, etc. A ce point, la question se pose : par où commencer ?

Nous croyons que ce doit être par les comités civils de dialogue, comme structures de base pour l'organisation et l'action. Ces comités ne devront pas se convertir en courroies de transmission des ordres d'en haut. Ils doivent penser par eux-mêmes, développer leur propre organisation et établir entre eux des réseaux de relation et de communication.

Enfin, cette nouvelle force politique ne cherchera pas à se transformer en avant-garde, ni à se présenter comme détentrice de la vérité (...). Ainsi elle ne pourra exister qu'avec un programme ouvert (...) et si elle parvient à faire coexister en son sein des tendances différentes. (...) Il faudra accepter différents types d'accord : unanimité, mais aussi synthèse, consensus, ou même des propositions temporaires, qui seront l'expression de divergences mineures et inévitables. (...) Simultanément, les opinions de la minorité devront être conservées et respectées comme de possibles d'alternatives futures, les positions majoritaires devront toujours être exposées à l'épreuve de la réalité (...).


Volcans, numéro 23/numéro 9

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