Les armes militaires et économiques sont loin d'avoir disparu de la panoplie du gendarme yankee. Sa mainmise sur Haïti, le harcèlement de Cuba, que les républicains voudraient encore intensifier, via la loi Helms-Burton, ou l'appui anti-insurrectionnel au Mexique, sont là pour nous le rappeler. Mais l'image de l'oncle Sam n'en reste pas moins par trop grossière pour saisir les enjeux continentaux.
Tout d'abord, les Etats-Unis ne constituent pas une structure monolithique dotée d'une stratégie unique, mais plutôt un espace où s'affrontent des intérêts divergents. Les lobbies industriels, les secteurs « progressistes » du Parti démocrate, ou les fonds de pensions américains n'ont visiblement pas les mêmes priorités.
Ensuite, en engageant les économies latino-américaines dans la voie de l'ouverture commerciale et financière, les Etats-Unis ont déclenché un processus qu'ils sont loin de pouvoir toujours contrôler. L'exemple du Mexique en est l'illustration. Si les années 80 ont été celles d'une subordination accrue de l'Etat mexicain aux injonctions américaines, la mise en cause du « nationalisme économique » a profondément miné la légitimité du parti au pouvoir, compromettant une stabilité politique chère au Etats-Unis. Et si la crise monétaire mexicaine de l'hiver 1994-95 a permis d'accentuer encore les pressions sur le gouvernement mexicain, elle suggère également que la libéralisation financière, de par l'instabilité économique qu'elle entraîne, ne favorise pas non plus l'émergence d'un « environnement stable » pour les citoyens américains.
Les Etats-Unis ont par ailleurs si bien chanté les vertus des accords libre-échange, que les négociations vont bon train dans le continent. Avec cependant un hic : le Brésil se démène pour que le Mercosur (marché unique du Cône sud) se construise sans l'encombrant voisin du Nord.
L'hégémonie américaine est donc parfois malaisée. Aux mouvements de résistance d'en profiter...
, numéro 25